Economie

Projet Bukanga Lonzo : La vérité selon Africom !

Pour gagner le combat de la production agricole, l’autosuffisance alimentaire et celui de la diversification de l’économie de la RDC, le gouvernement congolais avait levé l’option de lancer un ambitieux projet agricole dans la province du Kwango. Le projet du parc agro-alimentaire de Bukanga Lonzo signé en 2014 avec la Société Sud-Africaine Africom Commodities itd qui devait se dupliquer sur l’ensemble des provinces de la RDC aurait coûté un peu plus de 200 millions de dollars. En lançant le méga projet, l’élite congolaise disait et croyait que le spectre de famine et la dépendance pour l’importation des produits de base n’allaient être que de vieux souvenirs.

Pour certifier et contrôler la gestion du projet Bukanga Lonzo l’Etat congolais avait fait appel à Ernest & Young (EY), une structure, parmi les leaders mondiaux de l’audit. A la lecture du rapport de cette firme, comme à la lecture des plusieurs analyses, force est de constater que le projet de Bukanga Lonzo n’a pas été un succès.

Aujourd’hui, en RDC, ce projet est cité comme l’exemple parfait des projets faits sans études sérieuses en amont et sans contrôle rigoureux en aval. Chacun se rappelle que lors du discours de la célébration du 60ème anniversaire de l’indépendance de la République Démocratique du Congo, le Président Félix Tshisekedi avait fait mention de ce projet en ayant des mots durs. En pleins préparatifs de la célébration du 30 juin, le chef de l’Etat avait déclaré : « je souhaite que l’expérience douloureuse révélée au cours du procès en rapport avec le programme des 100 jours tourne définitivement la page de la longue série de projets et programmes qui, à travers l’histoire de notre pays, ont donné lieu à d’importants coulages des ressources publiques en toute impunité. Je pense notamment au projet de Bukanga Lonzo… »

Cette mention en disait long sur la perception que la plupart des congolais se font de ce projet implanté dans la province du Kwango, sur une étendue de 70 000 hectares.
En taclant l’échec patent de Bukanga Lonzo, l’opinion nationale voyait Matata Ponyo, ancien premier ministre, présenté par certains, (à tort ou à raison ?) comme le géniteur et le gestionnaire du méga projet. A Kinshasa, comme dans les provinces, citer Bukanga Lonzo, revient à citer Matata Ponyo et épingler l’échec du projet, revenait à infliger une mauvaise note au technocrate à la cravate rouge. L’homme a eu beau expliquer les arcanes du projet pour faire comprendre ce qu’il en était réellement et les responsabilités des uns et des autres, rien n’y est fait. Pour beaucoup dans l’opinion publique, le projet de Bukanga Lonzo a été l’arnaque de la décennie en RDC et son échec est à mettre sur le dos de l’ancien premier ministre. Et les chiffres engloutis dans le projet font frissonner.

Selon les informations en notre possession, un premier décaissement à hauteur de 92 293 337 dollars américains avait été fait par le gouvernement. Cette somme allait servir à la construction de l’usine, l’aménagement du site, entre autres. Un flou artistique entoure la suite des décaissements. Certains responsables affirment que le financement avait atteint et même dépassé 200 millions de dollars.

Alors que les congolais attendaient maïs, soya, arachides, pomme de terre, tomates, oignons, le méga projet a fait flop, et à la place des denrées alimentaires censées sortir des terres du Kwango profond, cette partie de Bandundu devient le point noir d’un projet dont la conception avait été mal pensée et le suivi a été mal assuré. Selon le rapport de l’audit de la société Sud-africaine Ernest & Young cité par des confrères, « l’opacité dans la passation du marché, la mauvaise comptabilité et le détournement des fonds » ont caractérisé le projet.
Le premier ministre Ilunga Ilunkamba a fait l’amer constat des fonds publics jetés par la fenêtre lors de son passage dans la province du Kwango. Le commentaire du chef du gouvernement, homme taciturne et très réservé, a fait de gros titres de la presse Kinoise. Chacun y allait de son chiffre.

Sans fard, ni gants, une grande partie de l’opinion nationale et de la classe politique sont tombées sur Matata Ponyo. L’ancien premier ministre en a pris pour son grade. Se basant tous sur le constat d’échec fait sur place à Kwango et s’appuyant sur le rapport Ernest & Young, le coupable était tout trouvé. D’aucuns en appelaient même à l’ouverture des enquêtes en vue de finir par un procès « exemplaire », à la manière du procès 100 jours.

Mais voilà que dans cette polémique où la nuance et la retenue n’avaient plus leur place, une voix naviguant à contre-courant surgit. La société Sud-africain Africom Commodities itd, ayant signé le contrat avec le gouvernement pour le projet de Bukanga Lonzo, lave l’ancien premier ministre.

Répondant à une question sur les allégations de prétendue corruption entre son entreprise et l’ancien Premier ministre Matata Ponyo, Christo Globler, manager general de cette societe Sud-Africaine, declare, « Je n’ai rencontré Monsieur Matata qu’une fois dans son bureau pendant 10 minutes et nous n’avons évidemment pas discuté des questions d’argent. Donc, pour répondre à votre question. Non, il (PM Matata) n’a jamais été impliqué dans des discussions financières. S’il vous plaît garder à l’esprit que tous nos revenus, dépenses, actifs, etc, sont soigneusement documentés et vérifiés par chaque centime, chaque actif et toutes les dépenses et les revenus », ajoute-t-il.

A la question de savoir si le projet a été surfacturé, selon ce que dit le rapport d’Ernest & Young, Christo se dit « étonné de voir dans le rapport des auditeurs d’Ernst & Young qui ont comparé les prix sans jamais prendre en considération la logistique, le transport des matériaux jusqu’à Bukanga Lonzo, l’assemblage des tracteurs, l’entretien, le plan d’entretien, le pétrole, diesel, pneus, assurance, etc.

Le numéro 1 d’Africom explique selon lui pourquoi le projet de Bukanga Lonzo a échoué : « Le jour où l’équipe de Matata est partie et a été complètement « désintégrée » a été le début de la fin de Bukanga Lonzo. Si l’équipe de Matata était encore active aujourd’hui, Bukanga Lonzo aurait été la success story du continent ! »

« Bien que je ne connaisse pas le Premier ministre Matata sur le plan personnel, je pense honnêtement que sa vision et sa prise de décision décisive ont été un atout énorme pour la RDC », pense le manager d’Africom qui enchaîne, « j’ai souvent pensé qu’il fallait un homme fort comme lui pour faire prospérer un projet comme Bukanga Lonzo. Malheureusement, lorsqu’une personne parle d’une personnalité de haut niveau comme le Premier ministre, les gens pensent immédiatement qu’il y a de l’argent, de la corruption. Bukanga Lonzo est (ou pourrait être) l’un des projets agricoles les plus viables du continent africain. Comme une opportunité d’affaires, ce serait une entreprise extrêmement rentable qui pourrait apporter la prospérité à cette province pas connue en RDC ou même en Afrique. Malheureusement, très peu de gens comprennent ou ont la capacité d’envisager cette énorme opportunité ».
En guise de conclusion, Christo Globler affirme que « Bukanga Lonzo peut littéralement redémarrer 7 jours après le feu vert du gouvernement. À ce jour, je dois honnêtement vous dire que beaucoup de gens n’ont pas la moindre idée du potentiel d’un projet comme Bukanga Lonzo ».

Aujourd’hui, malgré les polémiques politiciennes, le gouvernement a à cœur de relancer le projet.

Patrick Ilunga

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