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RDC : L’Union Africaine indignée des massacres des civils

Plus de dix jours après le massacre qui a coûté la vie à plusieurs civils à Kishishe et Bambo, deux territoires de Rutshuru à l’Est de la République démocratique du Congo, l’émotion ne retombe pas. Les déclarations de condamnation se multiplient. Dans un communiqué publié samedi 10 décembre, L’Union Africaine exprime son “indignation” et “dénonce avec la plus grande véhémence ces crimes odieux”. Le 29 et le 30 novembre, après des affrontements à l’arme lourde dans certains villages de Rutshuru, à l’Est de la RDC, les rebelles du M 23 ont tué des civils, selon “une enquête préliminaire” du Bureau Conjoint des Nations Unies pour le droit de l’homme et de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation du Congo (Monusco). Selon cette enquête préliminaire, les rebelles du M23 ont tué ce jour-là “au moins 131 civils, dont 17 femmes et 12 enfants à Kishishe et à Bambo”, deux villages du territoire de Rutshuru. La Monusco déclare aussi que 60 personnes ont été enlevées et 8 personnes ont été violées.

L’Union Africaine “demande que la lumière soit faite sur ces actes criminels dans les plus bref délais afin que les responsables de tels crimes subissent les châtiments et sanctions que dicte le droit”. La République démocratique du Congo a déjà ouvert une procédure judiciaire pour punir les auteurs de ces massacres dont le nombre des morts devient controversé. Pour le gouvernement congolais, au total 272 civils ont été tués en deux jours. La Monusco renseigne que “les rebelles du M 23 auraient enterré eux-mêmes les corps des victimes, dans ce qui pourrait être comme une tentative de destruction des preuves”.
Le gouvernement de la RDC a informé qu’il a documenté tous ces actes dans “un livre blanc” et tente de demander à la Cour Pénale internationale de reconnaître ces actes comme crimes de guerre et crimes contre l’humanité. La ministre de Justice Rose Mutombo a invité, mardi 6 décembre, la Cour pénale internationale (CPI) à traquer “les criminels” qui écument l’Est de la RDC.
Elle a lancé cette invitation au cours de son intervention à la 21è Session annuelle de l’Assemblée des États parties au Statut de Rome, tenue à La Haye aux Pays-Bas.
Rose Mutombo a également demandé à cette cour de sévir contre les auteurs des crimes de guerre, contre l’humanité et celui de génocide et d’agression rwandaise dans l’Est de la RDC. Elle a nommément cité entre autres les rebelles du M23 et les ADF.

Pour L’Union Africaine, les groupes armés doivent accepter de s’engager à la recherche de la paix. “L’Union Africaine demande avec insistance à tous les groupes armés de déposer les armes et de s’engager, de bonne foi et sans conditions préalables dans le processus politique pacifique sans conditions préalables à la feuille de route conjointe adoptée à Luanda le 23 novembre 2022”.

Depuis la mise en place de la feuille de route de Luanda, qui a été signée par la RDC, le Rwanda, l’Angola, en présence des leaders de la région des Grands Lacs et d’Afrique de l’Est, la trêve n’a été observée que peu de jours seulement. Les rebelles ont gardé leur position, même si ces rebelles du M 23 ont fait savoir qu’ils sont prêts à se retirer, moyennant des “discussions directes” avec le gouvernement de Kinshasa et une rencontre avec le facilitateur Uhuru Kenyatta. La requête des rebelles n’a pas obtenu gain de cause. Et aux fronts du Nord-Kivu, la violence est quasi-quotidienne. Le Ministre de la Défense Nationale Gilbert Kabanda a informé le gouvernement lors du Conseil des Ministres du 9 décembre “l’assassinat, à la machette, le 24 novembre dernier, par le M23 et alliés, de quelques déplacés de guerre de Kanyaruchinya, lorsque ces derniers étaient à la recherche de braise dans le Parc National des Virunga…”, à l’Est de la RDC.

Processus de Nairobi, une longue marche pour la paix?

Cinquante-trois groupes armés de la République démocratique du Congo, réunis au Kenya dans le cadre du troisième round processus de paix de Nairobi, sous l’égide de la Communauté d’Afrique de l’Est, ont accepté de déposer leurs armes, tandis que Kinshasa trouve les moyens de répondre à leurs doléances, notamment le retrait des groupes armés étrangers du pays.
C’est l’une des résolutions prises dans le communiqué final lu lors de la clôture de la réunion d’une semaine à l’hôtel Safari Park, à Nairobi.

Notant que le processus de recherche d’une paix durable dans la région prendra du temps, le facilitateur du processus, l’ancien président kenyan Uhuru Kenyatta, a déclaré que les résolutions adoptées au cours de la réunion visent à traiter des questions qui peuvent être résolues à court terme.

“Je pense que nous avons surestimer notre capacité par le fait de penser que nous pouvons résoudre ce problème en un jour. Ce qui est important, c’est que nous avons commencé le voyage pour trouver une paix durable dans l’est de la RDC. Nous sommes satisfaits des progrès accomplis ; nous ne disons pas que nous avons tout terminé, mais nous avons réussi à franchir certaines étapes en termes de questions spécifiques qui seront traitées par la RDC et d’autres qui seront traitées par les délégués présents ici”, a déclaré M. Kenyatta.

Ces questions comprennent la cessation inconditionnelle des hostilités par les groupes armés, la formation d’un comité chargé de faciliter la libération des prisonniers sans casier judiciaire et la libération des enfants soldats.
Uhuru Kenyatta a également demandé que les femmes ne soient plus agressées. “Cessez d’agresser les femmes”, a-t-il déclaré. L’ancien chef de l’État a personnellement demandé aux groupes armés de “parler à leurs frères restés au pays” pour qu’ils cessent de profiter de la situation pour agresser sexuellement les femmes.

“Les histoires que j’ai entendues de la part des femmes sont honteuses et diaboliques. Un homme qui commet de tels actes sur une femme n’est pas un être humain mais un animal. Disons à nos fils de respecter et de protéger nos femmes et nos enfants… Je n’ai aucun intérêt dans vos minerais ou vos forêts, mais j’ai besoin que vous respectiez vos femmes et que vous conseilliez à vos fils de faire de même”, a-t-il imploré.

Selon le communiqué final du dialogue intercongolais de Nairobi, le président de la République Félix Tshisekedi devra organiser une grande réunion en janvier 2023 à Goma et Bunia, dans l’est de la RDC, “pour évaluer les progrès des engagements pris à Nairobi.
“Nous voulons voir la mise en œuvre des fruits à portée de main d’ici janvier, puis nous pourrons aborder les questions plus profondes qui nécessitent plus de temps, plus de consultations et de délibérations avec les partenaires, car les aspects à moyen et long terme ne sont pas des choses que la communauté d’Afrique de l’Est ou la RDC peut faire seule. Ils nécessitent le soutien des partenaires de développement”, a déclaré M. Kenyatta.

Signature du communiqué

Tous les groupes armés représentés à la réunion ont signé le communiqué aux côtés du facilitateur et de ses deux envoyés – le kényan Macharia Kamau et l’envoyé spécial du président de la RDC Félix Tshisekedi, le professeur Serge Tshibangu – en signe d’engagement à mettre en œuvre les résolutions. Selon le communiqué final du dialogue, le président Félix Tshisekedi doit tenir des consultations avec les différentes couches des populations des 145 territoires de la République démocratique du Congo afin de renforcer la recherche de la paix.
Le Dialogue inter-congolais recommande également qu’un appel soit lancé à la communauté internationale pour qu’elle soutienne le gouvernement de la RDC dans la mise en œuvre de la feuille de route issue du processus de Nairobi, y compris le soutien aux programmes de démobilisation, de désarmement et de réintégration communautaire et sociale (PDDRCS). Les groupes armés ont accepté de s’engager dans ce
Programme. Ils ont cependant désavoué “de manière unanime”, son principal animateur national, Thommy Tambwe, un ancien chef rebelle.
“Les groupes armés expriment leur manque de confiance avec certains animateurs du PDDRCS au regard de leur passé accablant qui a été décrié par les groupes armés et les autres composantes de la société civile” souligne le communiqué.

Tout au long des discussions à Nairobi, plusieurs délégués des groupes armés ont insisté sur le fait que des moyens financiers sont nécessaires pour assurer le désarmement. Certains rebelles ont expliqué qu’ils avaient déjà déposé les armes par le passé, mais que leur réintégration n’avait pas vraiment été prise en charge. En l’absence de soutien sanitaire et financier, nombre d’entre eux ont repris les armes. A Nairobi, les signataires du communiqué ont décidé de la mise en place d’un groupe de travail devant examiner et traiter la question des détenus et prisonniers des groupes armés et faire rapport aux instances judiciaires spécialisées pour une solution idoine.

Patrick Ilunga

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