Politique

L’alternance face au défi du dépassement de soi

Le climat est morose, les acteurs ont perdu l’enthousiasme de début et chacun a trouvé les raisons pour décélérer sa marche vers l’objectif commun. D‘abord, la polémique autour de ce qu’il convenait de faire avait plombé le Gouvernement de la République qui s’était promis d’observer une journée de méditation et de solidarité avec les populations fragiles. C’était une sorte de recul face à la montée au créneau des membres de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) et du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD) curieusement d’abord sur ce sujet. Aujourd’hui, la communication de la présidente de l’Assemblée nationale et l’interprétation multiple qu’on en fait a plongé la classe politique congolaise dans un malaise au point que les jointures de la coalition ont bougé heureusement sans se rompre. La crise est redoutée et pour l’éviter, les deux camps ont pris siège dans l’univers de la dissuasion politique.

D’un côté, il y a la forte possibilité constitutionnelle de dissolution de l’Assemblée nationale et de convoquer des élections anticipées. Au delà du tollé ou des appuis à cette idée, elle a été utilisée dans le champ de la dissuasion. Pour éviter l’affrontement rendu indispensable par la persistance de la contradiction, l’autre camp a aussi fait usage de son arme de dissuasion notamment, la mise en accusation pour ‘’haute trahison’’. Cette levée de boucliers a au moins servi à construire une bonne lecture du processus dans lequel se trouve notre démocratie. Quelles sont les premières évidences qui s’imposent à tout esprit rationnel ?

Le processus de gouvernance a fonctionné jusqu’à maintenant sous le label de l’inertie enthousiaste née des élections. Ayant conscience d’avoir échappé à une déflagration sociale, l’élite était heureuse de franchir ce pas difficile et surtout, avait tu ses divisions pour traverser le pont du changement pacifique.

L’attitude de deux leaders y a beaucoup contribué car, ils ont toujours eu la posture et les mots qu’il faut pour produire dans le pays l’apaisement nécessaire. Mais contrairement à eux et ceci au nom d’un déficit de préparation et d’imprégnation de la nouvelle atmosphère de l’alternance, plusieurs des lieutenants ont gardé leurs costumes des Combattants alors que le contexte avait changé.
Pendant toute l’année, les prises de positions furent toujours au nom des familles respectives et jamais au nom de la coalition. Ne s’étant pas organisé comme une centrale d’impulsion collective et ayant gardé chacun sa tenue alors même qu’ils prenaient un même bain, les membres du Front Commun pour le Congo (FCC) et du Cap pour le Changement (CACH) sont restés adversaires dans les réflexes et partenaires au moment de partage.
Pour s’en convaincre, il suffit de se demander quel communiqué fut signé par un porte-parole au nom de la coalition ? Dans la marche de la démocratie, cette situation n’est pas nouvelle, elle exige de la part de ceux qui seront d’une manière ou d’une autre redevable d’un bilan commun devant le peuple, de se projeter au-delà de leur identité et de savoir qu’à l’arrivée, il n’y aura ni FCC, ni CACH. Il n’y aura question que ceux qui ont exercé le pouvoir.
Alors, pourquoi se battre quand on sera examiné de la même manière ? Si cette coalition n’a pas dès aujourd’hui une réponse de comment elle va gérer l’année 2023, elle va vers un éclatement irréparable et c’est un risque qu’elle ne peut se permettre car, elle porte entre ses mains le socle de l’espérance nationale.

Aujourd’hui, la coalition semble oublier qu’elle est dans un mariage forcé par la volonté du peuple. Elle n’avait pas le choix de son identité politique assumée. Le peuple a décidé que dans cette séquence historique les adversités se muent en partenariat et que les hommes et femmes qui veulent le servir apprennent d’abord à se supporter comme compatriotes et qu’ils trouvent en eux la force de se supporter. Sinon, comment peuvent-ils prétendre à la grande reconnaissance si leurs forces sont utilisées pour se détruire mutuellement ?

La première année démontre que chaque membre de la coalition FCC-CACH est appelé au dépassement de soi pour trouver le filon du service au peuple. Chaque congolais élevé en honneur et en dignité, membre de cette coalition, devrait ressentir le devoir sacré de faire réussir celle-ci car, en le faisant, il obéit à la volonté du peuple souverain.

Cette alternance non désirée mais imposée par le peuple est aujourd’hui un cas de conscience pour ceux qui ne la trouvent plus à leur goût et qui veulent la casser. Le chemin de la cohésion nationale passe par là et exige de chacun de l’humilité et de la modération dans les prises de positions.
Le chef de l’État qui est le symbole de cette alternance, doit faire l’effort supplémentaire de réunir autour de lui les différents acteurs pour que tous comprennent qu’aucune situation antérieure ne reviendra dans son format d’antan.

Demain va s’occuper de lui même mais il faut lui donner les prémisses d’un Congo nouveau débarrassé des démons du fanatisme. S’il y a une volonté cachée dans cette répartition inédite post électorale, c’est le fait que le ciel nous demande de trouver comme le disait un philosophe du premier siècle : « Sachons trouver ce qui rend semblable les choses différentes et prenons ensuite en compte ce qui rend différentes les choses semblables ».

WAK

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