C’est la rencontre historique. Ce vendredi, le président Félix Tshisekedi sera reçu par son homologue chinois Xi Jinping. La rencontre a une forte valeur diplomatique et cette valeur va se répercuter certainement sur l’ensemble des rencontres qu’aura la délégation de la RDC et les accords qui devraient être signés, porteront, à coup sûr cette forte charge diplomatique. Félix Tshisekedi face Xi Jinping, l’image doit rappeler forcément les heures de gloire de la RDC où le président Mobutu avait l’habitude d’être l’hôte de marque des dirigeants chinois. Autre temps, autres enjeux. Si à l’époque, le maréchal profitait de l’aura des dirigeants chinois pour se remettre en selle, ce vendredi, le président Félix Tshisekedi aura certainement en tête comment remettre le Congo sur une base plus saine avec la Chine et en tirer le maximum de bénéfice.
Ce premier voyage en Chine du Chef de l’État Congolais depuis son arrivée au pouvoir en janvier 2019, va l’amener à Shenzhen, Shanghai et Hong Kong. Tshisekedi et Xi Jinping vont se voir en face, après leur discussion par téléphone en novembre 2022, au cours de laquelle, le président Congolais avait salué les relations bilatérales tout en évoquant sa détermination d’approfondir, sans cesse « l’amitié traditionnelle entre les deux pays et à promouvoir le partenariat stratégique RDC – Chine pour obtenir des nouveaux résultats dans l’intérêt des deux peuples ». Certes, ce sont les autorités chinoises qui ont invité le président Félix Tshisekedi, mais pour le Chef de l’État Congolais, il s’agit d’un voyage stratégique pour renforcer la coopération entre la RDC et la Chine.
Tshisekedi est allé en Chine, accompagné de dix ministres de son gouvernement, dont le ministre de la Défense, ministre de l’environnement, ministre des Mines, ministre du Numérique, ministre des Finances…
« Outre les hauts dirigeants chinois, le Président Félix Tshisekedi va consacrer un peu plus de temps pour des échanges économiques avec le monde des affaires », a renseigné le bureau de communication du président Congolais.
Le Président de la République rencontrera également des entrepreneurs chinois dont le géant de la téléphonie Huawei.
Il est prévu une série d’échanges avec le monde économique chinois.
La présence des membres du cabinet et du gouvernement du Chef de l’État et de près de dix membres du gouvernement central présage de la diversité des dossiers à traiter en Chine. Traditionnellement, la RDC signe des accords économiques avec la Chine. Mais cette fois, le domaine sécuritaire pourrait être évoqué. D’où la présence du ministre de la Défense aux côtés du président Tshisekedi.
La RDC étant confrontée à la guerre au Nord-Kivu et à une insurrection d’un groupe des insurgés à Kwamouth, à l’Ouest du Congo et à l’entrée de Kinshasa, le chef Congolais devrait probablement signer des accords de sécurité avec la Chine pour pousser Pékin à soutenir Kinshasa à éteindre les foyers de tension qui se propagent de l’Est, au Sud jusqu’à Kinshasa. La Chine vient de livrer des drones militaires à la RDC en ce mois de mai. L’empire du milieu devrait livrer encore plus de matériels militaires à la RDC.
Coopération gagnant – gagnant
Après les échanges entre les autorités Congolaises et leurs homologues Chinoises, la voie sera balisée pour la relance, dans les prochains mois, de la Commission mixte RDC-Chine et la signature d’un accord cadre. Les autorités Congolaises estiment que la relance de la coopération économique et multisectorielle entre la Chine et la RD Congo permettra de mettre en place des accords réellement gagnant – gagnant. En toile de fond, il s’agira de remettre sur la table des questions qui créent actuellement des frictions entre la Chine et la RDC.
La coopération gagnant – gagnant avec la Chine est devenue le leitmotiv des autorités du Congolaises. Pour les dirigeants de la RDC, il faut coûte que coûte trouver un rééquilibrage dans le contrat que la RDC avait signé avec un groupement d’Entreprises Chinoises le 17 septembre 2007. 15 ans après la signature du « contrat du siècle », qui était aussi appelé contrat des « minerais contre infrastructures », les autorités sont arrivées à la conclusion que le contrat était largement profitable aux entreprises chinoises, au détriment de l’État Congolais, que la construction des infrastructures a connu une grande « lenteur », et que pour le développement du « secteur minier le déséquilibre est inquiétant et déplorable ».
Bien avant que Félix Tshisekedi ne voyage pour la Chine, son gouvernement a mis en place un « comité stratégique » qui doit travailler avec la partie Chinoise pour parvenir à un contrat supplémentaire qui aura pour but de corriger les failles et déséquilibres du précédent contrat.
Cela représente un travail délicat, mais le président Tshisekedi semble déterminé à corriger « le mauvais contrat » signé en 2007. Patrick Muyaya, ministre de la communication et porte-parole du gouvernement Congolais a informé que le président Tshisekedi a demandé aux membres du « comité stratégique » de « convenir et d’organiser avec la partie Chinoise, dans un bref délai, l’agenda des discussions et de la signature
finale du futur Avenant ». Un grand nombre d’experts venus de l’Initiative pour la Transparence des Industries Extractives, RDC (ITIE); l’inspection générale des finances; de l’Agence de Pilotage, de Coordination et de Suivi des Conventions de Collaboration signées entre la République Démocratique du Congo et les partenaires privés ont été ajoutés au « comité stratégique » pour approfondir les discussions avec les entreprises chinoises pour trouver un accord supplémentaire.
L’ex-président Joseph Kabila (2001-2019) avait négocié en 2007 un contrat sous forme de troc – cobalt et cuivre contre la construction d’infrastructures – avec un consortium chinois pour un montant de 9 milliards de dollars, renégocié à 6 milliards. Sous pression du Fonds monétaire international (FMI). A ce jour, près de 2,74 milliards ont été décaissés par la partie chinoise, pour l’essentiel sous forme d’investissements.
Patrick Ilunga
