S’il y a une chose à établir sur Corneille Nangaa Yobeluo, c’est le fait qu’il ne fait pas les choses à moitié. L’ancien président de la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a l’esprit du détail et de parachèvement. Plusieurs cercles avaient formulé des doutes quant à la sincérité de sa démarche estimant qu’au mieux c’était une sorte de jeu d’enchères dans ce paysage où pullulent les maîtres-chanteurs politiques. Mais sa descente sur terrain à Kisangani et la réaction assez surprenante des populations ont vite fait de lever l’équivoque sur la solidité de sa démarche politique. Corneille Nangaa est effectivement devenu un politique, au sens cartésien du terme, c’est-à-dire qu’il se positionne sur le marché des offres politiques et veut concourir à la compétition électorale pour éventuellement, voir se réaliser sa vision du monde et son projet de société pour le Congo.
Il est vrai qu’au niveau des partis politiques mallettes, la République Démocratique du Congo (RDC) est parmi les champions car l’immensité du territoire, la diversité des vues et l’insondable âme du Congolais sont des facteurs qui découragent certains, qui n’osent pas sortir des cybercafés où ils élaborent leurs projets et les transportent après dans des fardes chemises, espérant trouver preneur.
Loin de cette image caricaturale, le Président National de l’Action pour la dignité du Congo et de son peuple (ADCP) a décidé de faire les choses en grand en allant s’identifier et s’enrôler à Kisangani, ville mythique et symbolique des naissances politiques à destin. Prévu de tenir un meeting à la place de la Poste, il a dû se résoudre à parler à sa base venue nombreuse devant le quartier général de son parti car, l’autorité urbaine n’avait pas autorisé qu’il tienne sa réunion à cet endroit.
Ils sont venus l’écouter en se posant la question de savoir que proposait-il ? Pourquoi s’est-il engagé en politique ? Ayant un langage de proximité car, partageant sans doute ce fond humain des tribulations quotidiennes, lui qui était au sommet des postures de décisions avait certainement des informations crédibles. Kisangani a vu venir son moment ADCP avec des milliers d’adhésions populaires et spontanées. Cette population ayant subi des traumatismes multiples tout au long de l’histoire, venait ainsi de se reconnaître dans le combat de Nangaa pour plus de justice, de liberté et de progrès.
Après ce moment fondamentalement politique et citoyen ayant abouti à son enrôlement, il y a eu une conférence-débat ouverte à l’intelligentsia locale, constituée des universitaires, des étudiants, des cadres, des religieux, des hommes d’église, pour ne citer que ceux-ci. C’est là où l’économiste Nangaa a dévoilé les liens de causalité entre la pauvreté des populations et la qualité de la gouvernance, entre l’orientation de l’éducation nationale et la qualité de l’élite, entre la force des hommes au détriment de la force des institutions, entre la place de la femme et la survivance des pratiques rétrogrades qui privent la Nation de l’énergie de travail de plus de la moitié de la population, entre la défense de la patrie et le triomphe des divers trafics au profit des individus.
Ayant construit devant ces hommes du savoir les antagonismes et contradictions qui empêchent le pays de décoller, le président de l’ADCP a dit que l’espoir était permis avec l’avènement d’une classe politique déterminée et motivée, nourrie aux valeurs morales et républicaines. Ce discours donné dans ce sens, a trouvé des oreilles attentives et plusieurs personnes ont décidé Hic et Nunc d’adhérer à cette jeune formation. S’il y a une chose qu’il faut affirmer, ce que dans cette partie du pays, l’offre de Nangaa a été accueillie avec enthousiasme et les adhérents se donnent le devoir de convaincre d’autres personnes.
Il est indiqué que dans les jours qui viennent que le parti politique dont il est le Président va compter sur l’échiquier national du fait de ce retour positif qu’il vient de recevoir de la base. Il faudrait compter avec ce parti surtout que son leader, Corneille Nangaa, est encore parmi les acteurs de premier plan de cette législature. Ayant voulu monter un parti construit à partir de la base, il a eu la démonstration avec les mamans de Kisangani qui se sont données le mot en lui demandant pendant son séjour dans cette ville de ne rien dépenser concernant son alimentation et celle de l’équipe qui l’accompagnait.
Comment ne pas considérer cette donne qui participe à la montée en puissance d’une structure même nouvelle mais ayant déjà le vent en poupe. Certains analystes pensent qu’il ne reste à Corneille Nangaa de se donner les moyens pour réaliser les alliances nécessaires à la construction d’un destin national car, la RDC, au regard de sa configuration sociologique, ne peut produire un leadership qu’avec des coalitions politiques.
Robert Tanzey
