Editorial

Éditorial-Le Sphinx : Son message ultime à la Classe politique et au peuple

C’était un certain mercredi 1er février 2017, la nouvelle était tombée en fin de soirée. Etienne Tshisekedi a rendu son dernier soupir à Bruxelles à l’âge de 84 ans. La nouvelle avait fait l’effet d’une bombe. C’était un pan de l’histoire du pays qui se refermait, à un moment particulièrement critique, où le pouvoir et l’opposition s’engageaient dans une lutte d’après « glissement« .

Tshisekedi c’était toute une histoire. Il incarnait la résilience, la résistance, la force de dire non à des forces prédatrices, la force d’affronter les brimades sans jamais ployer devant l’adversité. Son histoire, tout le monde ou presque la connait. C’est l’histoire d’un Congolais, né à Luluabourg(Kananga) en 1932. Il a moins de 30 ans lorsque le destin du Congo bascule avec l’accession à l’indépendance. Le premier coup d’État de Mobutu le propulse au devant de la scène. Étant un des rares intellectuels de l’époque, Tshisekedi qui se spécialise dans le domaine du droit, est parmi les commissaires généraux qui tentent de tenir le pays après le départ cahotique des Belges et les troubles post indépendance.

Les années 1960 sont celles de la gloire. Tshisekedi monte, s’affirme au côté de Mobutu, qui après son deuxième coup d’État, en 1965, lui confie encore plus de responsabilités. Il gère différents portefeuilles de l’État, assume des responsabilités à différents postes, s’engage dans à fond, dans ce qu’il croyait être l’œuvre de la refondation du pays. En 1967, il est de ceux qui rédigent le Manifeste de la Nsele, l’acte de naissance du Mouvement Populaire de la Révolution qui deviendra par la suite le Parti Unique, véritable machine politique de Mobutu Sese Seko.

Mais lorsque l’œuvre de refondation de l’État se dévoie, et que la république donne les premiers signes d’une impasse profonde en forme de péché
originel, Tshisekedi dit non. Il le dit ouvertement et à haute voix. Le non de Tshisekedi est symbolisé par la fameuse lettre ouverte de 13 parlementaires adressée au président-fondateur.
Nous sommes aux débuts des années 1980. A cette même période, Mobutu Sese Seko s’est fait maréchal. Il est à lui-même le Zaïre, le pouvoir et la force.

La lettre des parlementaires à Mobutu dénonce les dérives autocratiques du régime. Elle sonne donc comme une bravade au président du Zaïre. En réponse à l’outrecuidance historique des 13 parlementaires, procès, arrestation, bâillonnement et relégation. Toutes ces brimades n’avaient pas réussi à briser celui que plusieurs appelleront le lider maximo.
Début des années 1980, la bravade des 13 parlementaires s’était révélée l’acte de naissance d’un tsunami politique d’une rare puissance, l’UDPS.
Ce parti qui, au fil du temps, avait fini par être incarné par Étienne Tshisekedi, était le symbole de la résistance, à l’image de son leader. La formation politique dont l’hymne annonçait déjà une victoire future (« UDPS vaincra »), n’avait cédé à aucune tentative de liquidation (achat de conscience, intimidation, corruption). C’était l’esprit Tshisekedi qui s’était imprégné dans le parti. Au fil des années, la lutte pour la justice, la démocratie, l’État de droit étaient le leitmotiv du parti d’Étienne Tshisekedi. Même confrontée à l’épreuve du temps, la lutte de l’UDPS n’avait pris aucune ride.

Lorsque Étienne Tshisekedi décède en 2017, quasiment tous les observateurs parient sur la survie du parti. Fait rare en Afrique. Moins de deux ans après, non seulement le parti a survécu à son leader, mais il a accédé au pouvoir suprême; à l’imperium, comme il disait lui-même.
Près de 40 ans après le début de la lutte, le combat pour l’instauration de l’État de droit, le besoin de l’égalité de tous, devait commencer. 7 ans après la disparition d’Etienne Tshisekedi, ses héritiers n’ont pas renié le combat du père. L’amour du Congo et des Congolais, concept cher au sphinx, n’a jamais été aussi d’actualité. Dire non au mal, résister à l’agression et dénoncer l’agresseur sans fard, sans se cacher, sont tout aussi l’héritage du lider maximo. Tout ceci constitue en somme un ultime message du Sphinx à la classe politique et au peuple Congolais.
Les héritiers portent haut le flambeau, même si le changement global, idéal pour lequel Étienne Tshisekedi s’était engagé, reste encore un (lointain) défi à relever.

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