Editorial

Éditorial : MINEMBWE, Cheval de troie ou pierre angulaire ?

Dans un contexte de profonde suspicion et du retour au radicalisme et au populisme, comment parler de Minembwe sans prendre parti dans cette polémique sanglante qui a pris l’opinion publique au point de creuser une fissure de plus profondes entre deux conceptions notamment, celle de ceux qui pensent que l’érection de la commune de Minembwe procède d’un plan puissant du Rwanda d’accomplir son projet qui consiste à prendre quelques parties du territoire congolais. Ce plan dénoncé dans toutes les langues par des congolais s’est tellement épaissi qu’il est passé du domaine des faits spéculatifs les plus fertiles.

Il est vrai que le Rwanda n’a pas bonne réputation dans la sous-région et ne peut se présenter comme un modèle de démocratie. Mais on peut se demander si les différents complots qu’on on lui colle tiennent du fantasme ou de la réalité ?

En tout cas selon certaines opinions récoltées depuis l’installation du bourgmestre de la commune de Minembwe, le Congo a accepté le cheval de Troie qui est ici la communauté munyamulenge qui serait une colonne précédant le gros de troupes pour la future balkanisation du pays. Ils se sont donnés de le dire et de le proclamer en arguant carrément à la trahison des dirigeants actuels qui auraient vendu le pays. Cette opinion est répandue non seulement auprès des plusieurs leaders du Sud-Kivu, mais aussi dans plusieurs groupes d’opinion qui évoluent en occident et qui trouvent leur point d’orgue auprès des thèses développées par l’Apareco qui insiste depuis plus de 20 ans que la RDC serait plutôt occupée et dirigée par des forces extérieures dont le Rwanda est la base arrière. En face de cette thèse, une autre qui estime que cette décision des autorités procède du bon sens politique et de la réponse des autorités congolaises face aux revendications d’un groupe qui a demandé que ses droits lui soient reconnus depuis quelques années.

On se souvient que la guerre de 1998 qui a vu le RCD prendre des armes, avait pour fondement les revendications du peuple banyamulenge  qui estimait que la Nation devait lui accorder comme tous les autres les mêmes droits. Cette question fut l’objet des négociations à l’issue des pourparlers de Sun City. Il fallait pour cela donner un ancrage à cette catégorie des citoyens afin d’éviter non seulement un usage de la violence, mais aussi de concilier les usages démocratiques aux droits fondamentaux des citoyens. Plus tard l’accord cadre d’Addis Abeba signé par la RDC va aussi insister sur la nécessité de trouver la paix pour tous ceux qui se sont engagés sur le chemin de la revendication identitaire. Quand on examine les sources des conflits ces vingt dernières années en RDC, on peut comprendre que plusieurs affrontements ont eu pour point d’impulsion l’Est du pays et surtout le Sud-Kivu. Comment donner à cette recrudescence récurrente un frein définitif en ne réglant pas cette question d’ancrage ? Minembwe serait, selon les tenants de cette thèse, la pierre angulaire avec laquelle il faille construire la paix à l’est et ensuite dans toute la République. Si telle est la lecture des autorités, celle qui a fondé leur conviction dans cette action d’installation, il leur faut alors prendre le courage et le temps d’explicitation auprès de l’opinion qui a développé une autre lecture.

Pour ceux qui prennent le temps des analyses et qui aiment le Congo avant tout comme une terre de progrès, la vérité est entre les deux thèses, c’est pourquoi il faut de la vigilance et de la tolérance.

Adam Mwena Meji

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