Economie

ZLECAF : Une opportunité qui impose certains préalables pour sa réussite

Dans son interview accordée à la rédaction de Géopolis le 24 janvier 2021, le chercheur des questions économiques Christian Pinshi encourage l’intégration de la RDC à la zone de libre-échange continentale et pose certains préalables qu’il juge nécessaires que les décideurs congolais devront prendre en compte pour espérer au succès.

Le vendredi 22 décembre 2021, la chambre basse du parlement congolais a voté pour l’intégration de la République démocratique du Congo à la zone de libre-échange continentale africaine.

Pour ce chercheur de l’université de Kinshasa, cet acte est de grande importance et ambitieuses pour l’Afrique en général et la République Démocratique du Congo en particulier car avec un PIB actuel, estimé à 2,5 billions de dollars américains et une population de plus d’un milliard d’habitants, la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF) pourrait devenir la plus grande zone de libre-échange au monde.

« En effet, beaucoup pensent que la ZLECAF est une mauvaise décision et / ou une aventure trop risquée et développent un esprit pessimiste pour embrasser cette idée. Cependant, nous pensons que c’est une opportunité à saisir pour élargir encore la courbe des possibilités de production de l’économie congolaise, comme le disent toujours les scientifiques, les idées audacieuses sont comme des pièces qui se déplacent sur un échiquier : nous risquons de les perdre, mais elles peuvent également être le début d’une stratégie gagnante. Et jusqu’à présent, aucune nation n’a jamais été ruinée par le commerce international ou par une grande ouverture commerciale », a souligné ce chercheur.

« La question d’être prêt ou non ne se justifie plus car nous sommes en pleine maturité de la mondialisation, nous ne pouvons manquer de passer à côté précisément parce que nous craignons les pertes sur les recettes publiques (notamment par le biais de la baisse des tarifs douaniers) et celles-ci influent à leur tour l’économie dans son ensemble. En effet, l’impact de la baisse n’aurait d’effets qu’à court terme, car la ZLECAF nécessitera sans aucun doute de s’adapter à la baisse des tarifs douaniers sur les échanges intra–africains. Cependant, à moyen et long terme la ZLECAF ouvrira la voie à la viabilité budgétaire. La stratégie de la ZLECAF aura ainsi des effets positifs sur les finances publiques. Et la qualité de la croissance économique qui est générée par la ZLECAF permettra de mettre fin à la dépendance budgétaire à l’égard des recettes d’exportation des produits de base dont les prix sont volatils et la diversification engendrant la transformation structurelle ». Toutefois, ajoute le chercheur, « même à court terme, les recettes provenant des droits de douane sur les échanges intra-africains ne représentent qu’une petite part des recettes en RDC, et leur perte pourrait être partiellement compensée par d’autres impôts, comme la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), qui tend à être plus efficacement collectée », a t-il poursuivi.

Des préalables

Christian Pinshi estime que la République Démocratique du Congo devra mettre en place certains préalables pour consolider sa compétitivité et tirer pleinement parti des avantages potentiels des dispositions de la ZLECAF : À court et moyen terme, pour tirer pleinement parti des possibilités économiques offertes par la ZLECAF, les décideurs devraient créer un comité national stratégique (combinée des acteurs politiques et chercheurs) dans le suivi des questions liées à la ZLECAF en vue d’assurer une mise en œuvre réussie, elle devra soutenir l’innovation, car dans un contexte d’une concurrence accrue, l’innovation entre en scène.

Le Gouvernement devra ensuite s’approprier de la connaissance en augmentant les dépenses allouées à la Recherche-développement, en accordant plus d’attention aux entrepreneurs et en finançant massivement les projets rentables ; les dirigeants devront créer un espace budgétaire et enfin mettre en place une politique commerciale stratégique.

À long terme, pour tirer pleinement parti des possibilités économiques offertes par ZLECAF, les décideurs devront adopter des politiques d’appui afin d’encourager la transformation structurelle. En particulier, la RDC devra réduire sa dépendance à l’égard des produits de base et progresser dans la chaîne de valeur. Les politiques visant à encourager la transformation structurelle pourraient inclure des programmes de formation pour les travailleurs afin de garantir une réallocation en douceur de la main-d’œuvre et du capital vers des secteurs plus susceptibles de se développer, tels que le secteur manufacturier. Ce n’est que de cette manière que la RDC pourrait à long terme utiliser ZLECAF comme un mécanisme permettant de développer son économie et revendiquer sa place prépondérante dans la chaîne de valeur africaine, a renchéri Christian Pinshi.

Il est impérieux de rappeler que c’est à la dix-huitième Session Ordinaire de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de l’Union Africaine que l’adoption d’une stratégie visant à créer une zone de libre-échange continentale a eu lieu. Laquelle avait pour but d’approfondir l’intégration économique de l’Afrique ; intensifier le commerce intra-africain ; améliorer la compétitivité ; contribuer au mouvement des capitaux et des personnes ; promouvoir le développement socio-économique durable et inclusif ; transformer la structure des économies africaines et promouvoir l’industrialisation.

Édouard FUNDA

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