Economie

Entretien exclusif : Hubert Miyimi, DG de la Sonahydroc SA : ‘’ Après avoir stabilisé l’entreprise, nous sommes engagés dans la poursuite de la vision du Chef de l’Etat.’’

Le développement du secteur des hydrocarbures en République Démocratique du Congo (RDC) demeure une priorité majeure pour l’Exécutif national car, il permettra sans doute de relancer son économie et de réduire la pauvreté dans laquelle vit la majeure partie de la population Congolaise. C’est dans cette perspective que le Président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, s’est impliqué personnellement pour à la fois redynamiser et subventionner la Société Nationale des Hydrocarbures de la République Démocratique du Congo (Sonahydroc SA), dirigée aujourd’hui des mains de maître par l’Ingénieur civil de formation Hubert Miyimi Muwawa, concepteur et constructeur des stations-services de cette entreprise pétrolière publique. Au bord de la faillite hier, cette entreprise du portefeuille de l’Etat tente aujourd’hui de relever les défis en mettant en œuvre la Loi no15/012 du 1er Août 2015 portant régime général des hydrocarbures (Ndlr : La RDC dispose d’un potentiel en ressources d’hydrocarbures notamment dans trois bassins : le bassin côtier, la cuvette centrale et la branche Ouest du rift Est Africain). Une Loi qui fait d’elle l’instrument par lequel l’Etat participe aux activités d’hydrocarbures. Pour faire avancer la Sonahydroc SA, autrefois appelé la Congolaise des Hydrocarbures (Cohydro), l’actuel Directeur Général a mené d’abord une campagne de changement des mentalités en vue de mettre en place une nouvelle approche managériale fondée sur trois concepts clés à savoir : la crédibilité, la compétence et le comportement. Au cours d’une interview exclusive accordée récemment à ‘’ Droit à la Parole’’, une émission conçue, présentée et produite par William-Albert Kalengay, Directeur général de Géopolis Forum, le DG Hubert Miyimi a expliqué les missions de cette entreprise commerciale et ses perspectives d’avenir, tout en évoquant ses différentes réalisations, sans oublier les (grands) défis à relever. Ci-dessous, découvrez l’intégralité de cette interview.

William Albert Kalengay (WAK) : Monsieur le Directeur Général (DG), vous avez accepté de nous recevoir chez vous. Et nous ne pouvons que nous réjouir de cela. Sans plus tarder, nous allons tout droit dans le vif du sujet. Puisque cette émission nous la voulons une émission d’information sur le secteur des hydrocarbures. Ça fait quand même une dizaine d’années que ça ne bouge pas dans le sens des Contrats de partage de production (CPP). On ne voit pas des nouvelles entreprises s’installer dans le pays. Notre production est toujours périphérique, se situant seulement à l’océan atlantique. Cette question intéresse vraiment l’opinion. Mais nous commençons par vous. Par vous parce qu’après vous avoir observé personnellement, tout Directeur Général que vous êtes, vous êtes en train de mener une campagne sur le changement des mentalités. Et avant de parler de vous-même et de vous présenter aux lecteurs/téléspectateurs, je voudrais en liminaire vous poser la question de savoir pourquoi en tant que DG, vous avez accepté d’aller dans la campagne de changement des mentalités ?

Hubert Miyimi Muwawa (HMM) : Merci pour votre visite. Puisque c’est rare de trouver le journaliste à spécialité hydrocarbures. Merci aussi pour l’attention que vous portez sur notre modeste personne et surtout, sur l’entreprise que nous dirigeons. Pour répondre à votre question, tout développement commence par la prise de conscience. A notre arrivée à la tête de l’entreprise, dans l’état des lieux et le constat, nous avons trouvé une entreprise à bord de la faillite. Les stations-services n’étaient plus opérationnelles. Tout était bloqué. Dans l’état de lieux, nous avons constaté que l’entreprise était en faillite. Ce n’est pas parce que l’entreprise était mauvaise dans son objet social. Mais c’est parce qu’il y avait un problème d’hommes. C’était plein d’antivaleurs, des vols et des détournements de deniers publics, voire des ‘’débauches’’. Je ne mâche pas les mots. Je le dis. Donc, tout tournait autour des antivaleurs. Et ça était incrusté de telle manière que c’était très difficile de relever les défis de développement et de décollage de l’entreprise sans commencer par là. C’était donc le premier bouton à régler. C’est pour cette raison que, pour ceux qui me suivent et font partie de cette entreprise, j’ai commencé par bombarder moralement, spirituellement aussi. Puisqu’il a fallu une dose de l’aspect pastoral, je ne sais pas pourquoi les autorités ont choisi un pasteur. Mais c’est après que j’ai compris que pour relever le défi de cette entreprise, il fallait un pasteur. Je leur ai recommandé une seule chose. Si vous voulez que nous puissions ensemble relever les défis, il faut une prise de conscience et une nouvelle méthodologie managériale. C’est ainsi que je leur ai proposé les ‘’3C’’. C’est-à-dire, il me faut des hommes et des femmes crédibles pour avancer. Pour moi, la crédibilité qui est le symbolisme de ce que je vais utiliser pour avancer, est composée de deux autres C. Le premier C, c’est la Compétence. Il faut donc manifester une Compétence aiguisée et prouvée pour qu’on avance ensemble. Le deuxième C, c’est le Comportement. Tu peux être compétent mais si tu as un mauvais Comportement et une intelligence tournée vers les vols et la débauche, on ne pourra pas avancer. C’est donc avec ces 3C que je voudrais travailler.

WAK/ Merci pour cette entrée en la matière. Ce qui me permet donc de vous présenter aux lecteurs/téléspectateurs. Vous avez parlé et vous avez donné un contenu puissant. Je rappelle et je répète la Crédibilité, la Compétence et le Comportement. Mais, qui êtes-vous en fait ? Vous êtes un Ingénieur civil formé à l’Université de Kinshasa (UNIKIN). Et vous avez terminé vos études en 1985. Et vous avez eu beaucoup de formations notamment, des formations à Paris (France) dans le domaine des stations-services, formations dispensées par la compagnie ELF devenue aujourd’hui Total. Vous avez travaillé aussi dans cette entreprise comme Ingénieur-conseil pendant 8 ans. Et vous êtes spécialisé dans un secteur qui est assez rare et pointu notamment dans la conception, le design et la construction des stations-services. Et d’ailleurs, toutes les stations-services, a-t-on appris, utilisées aujourd’hui par la Sonahydroc SA, relèvent de votre conception, il y a une vingtaine d’années. Nous ne pouvons que vous félicitez parce que ces stations-services sont belles et pratiques. Vous avez été aussi Consultant à la Banque mondiale (BM), dans sa filiale la Société Financière Internationale (SFI), où vous a été préparé pratiquement comme expert des infrastructures dans le domaine des Zones économiques spéciales (ZES). Vous avez été donc Coordonnateur dans cette filiale de la Banque mondiale. Vous êtes aussi un homme de Dieu. Donc, un pasteur à l’Eglise du Christ au Congo (ECC). Également, un homme de média car, vous dirigez l’Asbl Studio Sango Malamu (SSM). Voilà donc ce mariage des compétences, de crédibilité et finalement, de bon comportement. Alors, revenons à la Sonahydroc SA. Il est vrai que dans l’opinion publique, ce que vous avez décrit en interne, ça se vérifie à l’extérieur. Il y a quelques années, les gens ne voulaient pas aller à la station-service de l’ex-Cohydro parce que ses agents n’étaient pas honnêtes ni crédibles. On vous donne 20 litres alors que vous a payé pour 40 litres. Quelles sont donc les missions de la Sonahydroc SA ? Cette entreprise de l’Etat a pu changer de nom, il n’y en a pas eu beaucoup. C’est la seule entreprise qui a changé 3 ou 4 fois de nom en 20 ans. Ce qui signifie qu’il y a une recherche dans le domaine de ses missions. Quelles sont les missions de la Sonahydroc SA ? Qu’est-ce que l’Etat attend de vous ?

HMM/ Je suis venu justement pour mettre en œuvre la Loi en rapport avec la mise en place de cette société. Il s’agit de la Loi no15/012 du 1er Août 2015 portant régime général des hydrocarbures. Et c’est vers l’année 2017 que la Loi a commencé à être mise en œuvre, partant de la Sonahydroc SA. Selon cette Loi, la Sonahydroc SA devra gérer toutes les participations de l’Etat dans les activités pétrolières tant en amont qu’en aval. Nous avons la mission de constituer les stocks stratégiques des carburants. Présentement, nous avons trois principales activités en attendant la pleine application de la Loi : (1) La distribution commerciale des produits pétroliers, (2) le transport des carburants vers l’intérieur du pays par bateaux au moyen des barges citernes et enfin, (3) le suivi de nos participations dans la production du pétrole brut dans le bassin côtier.
La Sonahydroc SA vient de bénéficier d’une subvention de l’Etat pour réactiver sa fonction de fournisseur des produits pétroliers. Toutefois, je peux résumer les missions de la Sonahydroc SA en deux termes. Le premier, c’est l’amont pétrolier. Dans cet amont, il est demandé à cette société de faire de la prospection dans nos bassins sédimentaires, l’exploitation et d’atterrir sur l’exploitation des ressources d’hydrocarbures d’une manière générale. Dans cette recherche, nous ne devons non seulement pas nous limiter à l’identification du potentiel en matière des hydrocarbures mais d’aller aussi jusqu’à constituer une banque des données. C’est pour savoir effectivement si le pétrole est exploitable ou non. Et s’il faut attribuer un bloc pétrolier à tel ou tel investisseur après les appels d’offres et les études menées par nous-mêmes sur ce qu’il y a dans ce bloc pétrolier. Dans la chaîne des valeurs de pétrole et gaz, notre mission ne se limite pas seulement à l’exploration avec les opérateurs pétroliers mais c’est d’aller aussi développer des infrastructures notamment, l’implantation des raffineries et des pipelines pour le transport des produits pétroliers. Cette mission nous pousse aussi à relever un grand défi qui est celui de former des géologues, des pétroliers et d’autres spécialistes. Voilà ce que nous essayons de faire en amont.
Et en aval, c’est la partie distribution. Nous fournissons et importons des pétroliers. Et dans cette partie, nous avons trois dimensions : La première, c’est la distribution dans les petits réseaux sur toute l’étendue du territoire national notamment, les stations-services. En dehors de ces réseaux, nous avons le transport fluvial. A notre arrivée, ce secteur n’était pas au point. Mais nous avons essayé de remettre les choses en place car, nous avons réussi à faire venir des bateaux de Marseille (France). Et la Sonahydroc SA dispose aujourd’hui des deux bateaux opérationnels qui transportent des produits dans les villes et territoires notamment, à Brazzaville, Kisangani, Ilebo et dans d’autres parties de l’intérieur du pays. Sans fausse modestie, la Sonahydroc SA est la seule société du pays qui dispose aujourd’hui de la plus grande flotte.
Toujours dans la partie aval, nous avons récupéré les wagons-citernes de la Sonahydroc SA qui étaient entre les mains de la SEP-Congo (Services des entreprises pétrolières en RDC). Et nous les avons reconditionné à l’atelier de la Société nationale des Chemins de fer du Congo (SNCC) à Lubumbashi (Haut-Katanga). Et ces wagons-citernes sont au nombre de 16. Avec ces moyens de transport, nous importons à Kasumbalesa pour approvisionner le Kasaï (Muene Ditu et Kananga). Nous avons aussi l’ambition d’aller jusqu’à Kalemie (Tanganyika) et Kindu (Maniema). Et depuis notre avènement, nous vendons en partenariat avec un privé et nous n’avons pas de rupture de stock. Bien au contraire, à chaque fois que les privés ferment leurs stations-services pour contraindre l’Etat de réviser les prix à la hausse, la Sonahydroc SA a toujours laissé ouvert ses stations-services pour servir la population. Et il faut noter que la fixation des prix se fait de manière concertée entre l’Etat et les opérateurs pétroliers sous la supervision du ministère de l’Economie nationale. La Sonahydroc SA étant opérateur y participe à travers le comité de suivi.

WAK/ Monsieur le Directeur Général Hubert Miyimi, vous venez de peindre le tableau. Et merci pour ces informations. Mais avant de revenir à la question principale, quelles sont les connexions entre la Sonahydroc SA et la SEP-Congo ? Est-ce qu’il y a chevauchement ?

HMM/ Au fait, il n’y a pas chevauchement. La SEP-Congo est une société de mutualisation. Parmi les actionnaires de cette société, il y a la Sonahydroc SA qui est l’actionnaire majoritaire. Et puis, Cobil, Total et d’autres entreprises privées.

WAK/ Revenons à la tâche soft et puissante que vous devez accomplir. Il s’agit de l’exploration, de la découverte et de la mise en valeur des nouveaux gisements. Après dix ans, on est inquiet de constater qu’aucune entreprise n’est venue pour signer un Contrat de partage de production (CPP). Celles qui étaient-là ont, a-t-on appris, plié bagages au point que les blocs pétroliers qui étaient attribués font l’objet, soit des marchandages, soit des désistements. Pourquoi on a aujourd’hui l’impression que ce côté-là aurait été freiné ? Comme si on avait dit, pas question d’avancer. Pourtant, votre mission est de faire avancer l’exploration. Et pourquoi, il n’y a pas de nouvelles entreprises ?

HMM/ Je pense qu’il y a des choses qui relèvent du Ministère national des Hydrocarbures pour lesquelles je n’ai pas de mot à dire. Mais à ma connaissance, ce que je peux dire est que dès la promulgation de la Loi relevant des hydrocarbures en 2015, la configuration du secteur des hydrocarbures avait changé. Et cette Loi répond à votre préoccupation. Et je ne sais pas pourquoi cette Loi a traînée pour sa mise en application. Mais faut-il savoir aussi qu’avant cette Loi, cette société n’avait pas autant d’attributions en amont comme aujourd’hui. En ce qui nous concerne, nous continuons à travailler pour la mise en œuvre de cette Loi. Nous menons des recherches comme la Loi l’autorise. Nous pouvons le faire avec un investisseur qui peut être un congolais ou un étranger car, la Loi portant sur les hydrocarbures a donné à la société la possibilité de développer seule ou en partenariat les activités d’hydrocarbures tant en amont qu’en aval. A ce titre, notre ambition est d’arriver à explorer et à exploiter seule les hydrocarbures dans l’un ou l’autre bloc que l’Etat décide de nous attribuer.
Nous sommes également à la recherche des investisseurs qui peuvent nous aider à mener à bien cette recherche. L’inquiétude que vous avez par rapport à la mise en œuvre de cette Loi constitue notre préoccupation. C’est dans la mesure où on sait que l’énergie fossile sera déclarée dans 10 ans maximum ‘’ Energie Polluante ‘’. On n’a plus droit à l’erreur. Et on doit donc courir. Dans la joie et la tristesse, je dois vous dire que nous avons, selon notre cartographie et nos recherches, 35 milliards de barils de pétrole.

WAK/ Vous venez de toucher du doigt le problème. Notre pays s’est engagé dans le combat contre le réchauffement climatique et dans la mise en place des énergies non polluantes. Est-ce que le pays a un avenir dans le domaine des hydrocarbures et des énergies fossiles malgré les 35 milliards de barils de pétrole ? Est-ce qu’on peut exploiter ces ressources sans en réalité compromettre notre réputation de bon élève de l’environnement ?

HMM/ Me poser la question de savoir si nous avons un avenir, je pense que c’est très tôt. Et je pense que c’est la lutte que mène le Chef de l’Etat (Ndlr : Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo). Et ce n’est pas pour rien qu’il se déplace jusqu’à aller au Qatar qui est un pays gazieux afin de voir dans quelle mesure on peut développer la manne pétrolière et gazière de (dans) notre pays. Et nous sommes-là pour l’accompagner dans la matérialisation de sa vision.

WAK/ Il y a quelques années, le ministère des Hydrocarbures était parmi les champions de la défense de l’exploration dans le parc des Virunga, situé à l’Ets de la République. L’Etat congolais avait soutenu son ministère en déclarant que nous ne pouvons pas savoir ce qu’il y a à conserver si nous ne bénéficions pas de cette manne. Quelle est votre approche dans le domaine des activités en amont que vous avez citées ? Avez-vous continué l’exploration dans le parc des Virunga et d’autres aires protégées ?

HMM/ Pour le moment, nous n’avons pas encore touché ce chapitre-là. Surtout, lorsqu’il faut parler du Graben d’Albertine, du parc de la Salonga, de la Cuvette centrale et une partie de la forêt équatoriale. Mais, je pense que nous avons amorcé une bonne démarche en dialoguant car, c’est par le dialogue qu’on peut tout résoudre. Et nous avons pris langue avec le Directeur Général de l’Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) en vue de voir comment on peut résoudre le problème. Je crois qu’il y a la possibilité de le faire. On peut exploiter la forêt sans polluer grâce à la technologie actuelle. Si le Brésil qui a la même configuration que nous le fait, pourquoi pas nous ? Avant même d’entamer l’exploitation dans les zones à risque, il y a des choses qu’on doit d’abord comprendre. Toutes les réserves ne sont pas seulement contenues dans les parcs et les zones à risque. Il y a des zones où on peut exploiter sans contaminer. C’est pourquoi, je dis qu’il est grand temps d’avancer et d’arrêter les spéculations.

WAK/ Monsieur Hubert Miyimi, je rappelle que vous êtes un spécialiste dans la conception et la construction des stations-services. Aujourd’hui, nous voyons la prolifération des stations-services dans la capitale Kinshasa. Et ces stations sont concentrées même dans des centres urbains. Et nous, avec nos yeux des néophytes, nous n’en comprenons pas le sens mais nous savons que ces stations sont construites ou situées dans des espaces dangereux. Quels sont les principes pour les construire ? A quel endroit doit-on construire une station-service ? Et pour celles que vous avez construites où vous avez été aidé à construire par votre entreprise, quelles ont été les principes de base qui vont permettre d’identifier une bonne ou mauvaise station-service ?

HMM/ Quand je suis entré dans cette matière, on tenait compte de l’impact environnemental et de l’aspect des contaminations. A l’époque, on avait mis en place la Norme. En matière des stations-services, la Norme part de l’exploitation du sol quand on fait les essais du sol, on découvre la nappe phréatique, on identifie la qualité du sol pour savoir s’il y a de l’acide ou pas et comment les citernes vont se comporter vis-à-vis de ce sol. Il y a donc des choses qu’il faut tenir compte. Évidemment, dans notre pays, les conditions ne sont pas les mêmes comme en Europe. Mais, il faut prendre donc des précautions.
Dans l’impact social, il faut tenir compte de l’environnement. Puisque une station-service est presque une bombe. En cas d’incendie, c’est tout un quartier qui peut disparaître. Alors, ce n’est pas n’importe où on va ériger une station-service. C’est dans ce cadre qu’il y a des structures officielles qui sont habilitées en à autoriser la construction. Alors cette question ne relève pas de notre compétence. La Sonahydroc SA va même demander l’autorisation pour construire. La prolifération des stations-services est encore pire à Lubumbashi. Dans cette ville, on construit des stations-services et entrepôts pétroliers sans vraiment tenir compte de l’environnement.

WAK/ Vous avez dit que vous avez trouvé une entreprise en faillite. Mais depuis que vous êtes à ce poste, est-ce que vous avez touché le social des agents à part votre campagne de changement des mentalités ?

HMM/ Tout d’abord, je dirai que le social reflète l’état de santé de l’économie du pays. Et parler du social dans une entreprise, c’est toujours difficile. Mais du moins, il y a des efforts qui ont été fournis. Imaginez qu’on vous donne une entreprise sans fonds de roulement et sans réserves. Et nous avons trouvé cette entreprise dans cette situation.
Quand on vous nomme Directeur Général, on ne vous donne pas tous les moyens financiers pour faire telle ou telle chose. Au début, c’était difficile. Nous avons pu exercer nos méninges pour voir dans quelle mesure stabiliser le fonctionnement de l’entreprise après avoir sensibilisé les agents sur le changement des mentalités.
Dès le départ et grâce à un partenaire que nous avons trouvé, nous avons pu quand-même commencer à payer un mois sur deux les gens qui étaient impayés. La grande chose que nous avons faite aussi dans le social est d’avoir payé les pensions de retraite des 105 retraités qui étaient impayés depuis plusieurs années. Je pense que c’est quand-même énorme parce qu’il s’agit même des retraités de l’époque de Petro-Zaïre. Parmi les 105, on a payé même ceux qui sont morts. Leurs familles ont bénéficié de tout ça. Ce n’était pas facile. Mais on a pu le faire en demandant un peu des sacrifices aux agents actifs. Mon but pour prioriser le départ des retraités était de baisser la masse salariale. Puisque prendre quelqu’un qui a 30 à 40 ans de carrière au poste de Directeur, c’est beaucoup d’argent à dépenser. Comme je me suis occupé de ce point, je peux maintenant m’occuper des actifs. Il était donc important de remercier ceux qui ont posé le fondement sur lequel nous sommes en train de travailler. Pour ce qui est des agents actifs, la tâche vient d’être rendue un peu aisée par le Président de la République.
En passant, je dis grand merci au nom de tous les agents de la Sonahydroc SA. Puisque, 20 ans après, c’est la première fois que cette société s’est vue dotée d’une subvention de l’Etat partant de la structure des prix. Partant de ça, nous sommes maintenant en mesure de retrouver et de revoir notre travail en tant que fournisseur. A l’époque de Petro-Zaïre, c’est seule cette dernière qui importait les carburants. Aujourd’hui, nous avons plus de 30 fournisseurs. Ce qui fait que cette société ne peut plus jouer son rôle comme il le faut. Mais d’ici le mois d’octobre 2021, nous aurons notre fonds de roulement grâce à l’implication du Chef de l’Etat qui a manifesté une volonté concrète de faire avancer les choses.
Et aux actifs, je leur demande un peu de patience puisqu’il y a des choses qui vont se faire. Si j’avais commencé par m’occuper des arriérés de salaires des actifs sans dégager les retraités, ça allait être difficile. Je ne vais pas citer ici les entreprises qui sont dans cette situation. Des entreprises dans lesquelles, on trouve la masse salariale des retraités supérieure à celle des actifs. Il faut dire aussi que ce n’était pas facile de convaincre les syndicalistes sur cette question. Mais aujourd’hui, je pense qu’il me donne raison.

WAK/ Nous allons terminer cet entretien et nous espérons revenir vous voir pour pouvoir développer l’aval parce qu’on ne l’a pas beaucoup développé. Mais la question que je pose s’adresse à vous comme Directeur Général, comme pasteur et comme patriote. A quel moment, notre RDC pourra devenir un pays producteur du pétrole et pourquoi ne pas adhérer à l’Organisation des pays producteurs et exportateurs du pétrole (OPEP) ? Nous ne sommes pas producteurs malgré les 35 milliards de barils. Nous ne faisons qu’importer. Et d’ailleurs, une entreprise comme la vôtre ne fait qu’importer les produits pompés d’ailleurs. Alors, quelle est la foi et la confiance que nous pouvons avoir qu’un jour notre pays pourra devenir un pays producteur ?

HMM/ Merci pour cette question qui ne concerne pas non seulement les congolais mais aussi les africains puisque, lors du premier sommet sur le pétrole à Abuja, au Nigeria, cette question a été posée à tout le monde. Et ça fait l’objet d’un grand débat. Imaginez un peu que le Nigeria qui exploite déjà environ 3 millions de barils par jour devienne un pays producteur. Et par manque d’infrastructures de transformation et des raffineries, il ne raffine que les 10 % de leurs besoins. Jusque-là, ils continuent à importer. Et c’est la même chose en Angola et au Congo-Brazzaville.
Donc, c’est une question générale qui concerne les africains. L’effort doit être fait pour développer toute la chaîne des valeurs. Vous ne parlez que de pétrole mais vous devez savoir que nous avons aussi plus de 60 milliards de m3 de gaz méthane qui sommeille dans le lac Kivu et qui peut demain se transformer en une bombe (Ndlr : Comme au Nord-Ouest du Cameroun, un certain 21 août 1986 sur le lac Nyos. L’explosion avait déclenché la libération soudaine d’environ 100 000 à 300 000 tonnes de dioxyde carbone, tuant 1 746 personnes dont des femmes et des enfants). Il est donc temps de transformer tout ce potentiel en richesses.
Je dis que c’est possible. Et c’est un problème de volonté et le Chef de l’Etat a manifesté cette volonté politique. Et je crois que la matérialisation de cette volonté n’est pas un rêve. Il est possible qu’en peu de temps, nous puissions réaliser ce rêve.

Propos recueillis par WAK. Texte transcrit par Djodjo Mulamba.

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